Par Nicolas Per
Un dispositif essentiel pour les ménages vulnérables
Le tarif social pour le gaz et l’électricité a pour but de réduire la facture énergétique des ménages les plus vulnérables, en les protégeant des hausses soudaines de prix. En allégeant ces coûts, il vise à garantir un accès effectif à un droit fondamental : le droit à l’énergie. Ce mécanisme joue ainsi un rôle de bouclier contre la volatilité des prix.
Une augmentation marquée sur un an
Le tarif social contient les mêmes composantes que celles présentes dans les factures des contrats commerciaux, même si certaines taxes en sont exclues.
Électricité en centimes par kWh | Gaz en centimes par kWh | |
Avr. 24 – Juin 24 | 18,183 | 4,331 |
Juill.24 – Sept. 24 | 17,203 | 4,457 |
Oct. 24 – Déc. 24 | 18,923 | 5,126 |
Janv. 25 – Mars 25 | 20,815 | 5,894 |
Avr. 25 – Juin 25 | 22,538 | 6,19 |
Variation sur la période04/2024-06/2025 | + 24 % | + 42,9 % |
Entre le deuxième trimestre 2024 et le deuxième trimestre 2025, le tarif social a sensiblement augmenté. Pour l’électricité, il est passé de 18,2 c€/kWh à 22,5 c€/kWh, soit une hausse de 24 %. Pour le gaz, la progression est encore plus marquée : de 4,3 c€/kWh à 6,19 c€/kWh, ce qui représente une augmentation de 42,9 %.
Cette évolution a toutefois été partiellement contenue grâce au mécanisme de plafonnement appliqué par la Commission de Régulation de l’Électricité et du Gaz (CREG) au dernier trimestre 2024 et aux deux premiers trimestres 2025. Sans cette intervention, les hausses auraient été encore plus importantes.
Comparaison avec les tarifs commerciaux
Pour apprécier pleinement l’efficacité du tarif social, il convient de le comparer aux prix pratiqués sur le marché. Les tarifs commerciaux ont augmenté davantage que le tarif social, mais on observe des différences entre les contrats à prix fixe et ceux à prix variable. Même au sein de ces catégories, les écarts restent importants. Pour cette analyse, nous comparons le tarif social aux moyennes des prix des deux types de contrats, ces moyennes intégrant l’ensemble des composantes de la facture : coût de l’énergie, tarif d’utilisation du réseau, taxes, accises et TVA.

Comme nous pouvons le voir sur le graphique, pour l’électricité, le tarif social est resté nettement inférieur aux prix des contrats commerciaux tout au long de la période étudiée. L’écart avec les contrats à prix fixe est demeuré stable, autour de 13 c€/kWh en moyenne. En revanche, l’écart avec les contrats à prix variable a été plus fluctuant, atteignant un pic au premier trimestre 2025, en lien avec la forte hausse des prix moyens. Sur l’ensemble de la période, cet écart moyen s’établit à 8,7 c€/kWh.

Pour le gaz, l’écart entre le tarif social et les tarifs commerciaux est moins important en valeur absolue (en centimes par kWh), ce qui s’explique par des prix de base plus faibles. L’écart moyen avec les contrats à prix variable est de 2,2 c€/kWh sur la période, mais tend à diminuer progressivement, pour s’établir à 1,1 c€/kWh en juin 2025. L’écart avec les contrats à prix fixe est légèrement plus élevé, autour de 3,5 c€/kWh.
Ces données montrent que le tarif social pour le gaz se rapproche aujourd’hui des niveaux du marché, réduisant ainsi l’avantage tarifaire qu’il offrait jusqu’ici aux ménages bénéficiaires. Cette évolution soulève une attention particulière, en particulier dans un contexte où de nombreux foyers restent confrontés à des difficultés pour faire face à leurs factures d’énergie. Si le tarif reste plus avantageux que les offres commerciales, l’écart s’est sensiblement réduit, notamment pour le gaz, ce qui en limite l’impact réel sur le pouvoir d’achat des ménages les plus fragiles.
Conclusion : maintenir et réformer le tarif social pour préserver son efficacité
Malgré une augmentation significative au cours de l’année écoulée, le tarif social continue d’offrir une protection réelle aux ménages bénéficiaires. Même si l’écart avec les tarifs commerciaux s’est réduit, ce mécanisme reste plus avantageux, et contribue à amortir les effets des hausses de prix sur les ménages les plus vulnérables.
Le tarif social présente toutefois des limites, surtout en ce qui concerne les catégories de bénéficiaires qu’il couvre actuellement. En avril 2025, une proposition de résolution a été adoptée au Parlement fédéral, visant à remplacer le tarif social par une intervention forfaitaire. Or, cette prime constituerait un instrument beaucoup moins efficace. L’intérêt du tarif social actuel réside dans son mécanisme : en tant que tarif régulé, il est le plus avantageux du marché et s’applique automatiquement à l’ensemble de la consommation des ménages concernés.
Pour être tout à fait efficace, ce tarif social devrait être maintenu et, à l’avenir, attribué non seulement sur la base des statuts sociaux, mais aussi en tenant compte des revenus des ménages.
[1]https://www.creg.be/fr/consommateurs/prix-et-tarifs/tarif-social